~~Publié le 30/01/15 - HOSPIMEDIA Publié le 30/01/15 - HOSPIMEDIA - HOSPIMEDIA Publié le 30/01/15
En mars 2016 devrait être instauré un nouveau mode de financement des soins de suite et de réadaptation (SSR), qui impactera aussi bien le secteur privé que le public. La FHP-SSR est très inquiète sur les premières pistes évoquées par la DGOS. Hospimedia : "Quelle est votre opinion sur l'échelle de tarification unique qui pourrait structurer la prochaine réforme du financement des soins de suite et de réadaptation ? Dr Gabriel Bossy : Je suis pour une échelle de tarification unique. Cependant, le ministère veut lui adjoindre un coefficient sectoriel. J'ai demandé ce qu'est ce coefficient sectoriel et comment on le bâtit. Sur ce point, je suis réservé et prudent parce que ce coefficient sectoriel serait basé sur les coûts de fonctionnement de la structure. Or nous demandons de savoir ce qu'implique ces coûts de fonctionnement car si l'on considère qu'il faut trois personnes pour lever un plateau repas dans un secteur et une personne dans un autre secteur, les coûts ne seront pas les mêmes. Il ne faut pas que ce coefficient soit basé sur des coûts d'exploitation qui manqueraient d'objectivité. Dr Théodore Amarantinis : Un arbitrage politique est en cours sur trois points, d'où notre inquiétude. Premier point en débat, soumis par la DGOS au cabinet de la ministre : va-t-on vers une échelle de tarification unique aux deux secteurs public et privé ou s'achemine-t-on vers deux échelles ? Nous sommes favorables à une échelle de tarification unique pour deux raisons très simples. Nous avons un cadre réglementaire unique public/privé, qui date de 2008. Le législateur a donc estimé que les missions sont identiques aux deux secteurs. Deuxième raison : nous disons que nous avons des missions et des patients identiques, et cela a été confirmé par deux rapports officiels, l'un de la Cour des comptes et l'autre de la Cnamts. Donc nous sommes pour une échelle de tarification unique, assortie le cas échéant de coefficients sectoriels, qui prendraient en compte un différentiel de charge. Et nous avons demandé qu'une enquête sur ce différentiel de charges soit diligentée par l'Igas. En tout état de cause, si ce différentiel de charge est basé sur une multiplicité d'acteurs, sur les données en ressources humaines dans le secteur public SSR, alors ce différentiel de charges ne peut pas être considéré comme objectif. "Le législateur a donc estimé que les missions sont identiques aux deux secteurs." Deuxième arbitrage en cours : en dehors de l'échelle tarifaire, il y aurait une enveloppe ou deux enveloppes affectées au financement de la réforme en SSR. Ce n'est pas encore tranché, on verra ce que dira le ministère, nous ne sommes pas contre le principe, si tant est que les approches et les projections soient objectives. On pourrait prendre en compte, pour calculer cette enveloppe dans le secteur privé SSR, tout ce qui est notifié dans le bas du bordereau S34-04 (bordereau de facturation pour les établissements de santé privés, NDLR), c'est-à-dire l'affectation d'un certain nombre de dépenses qui émanent des libéraux (plus exactement le relevé d'honoraires médicaux, paramédicaux et de laboratoires, NDLR). Mais, pour cela, il faudrait une fongibilité d'enveloppe entre l'enveloppe de ville et notre enveloppe SSR privé. Troisième arbitrage, soumis au cabinet du ministre et pour lequel nous n'avons aucun retour : la proposition d'un modèle de financement qui serait composé de deux parties, dont une partie socle, une sorte de dotation pluriannuelle fixe, et une autre partie qui serait liée à l'activité. Pour nous, le compartiment activité doit être prépondérant, majoritaire, mais il y a des différences d'approche avec les autres fédérations. La FHF par exemple préfère dans un premier temps que les établissements soient financés majoritairement par une dotation fixe qui soit plus élevée que la partie activité. H. : C'est dans cette dernière hypothèse qu'interviennent les groupements médico-économiques (GME) ? T. A. : Oui c'est cela. Mais il y a un certain nombre d'obstacles techniques que nous qualifions de "bloquants". Les GME font partie de ces obstacles. Ces groupements sont censés déterminer l'intensité de la prise en charge. Ils sont basés sur un ensemble d'indicateurs de PMSI de type catalogue des actes de rééducation, dépendance… Mais pour nous, les GME ne sont pas du tout révélateurs de l'intensité de la prise en charge. En aucun cas ils ne peuvent décrire ce qui se passe pendant l'hospitalisation. Tant que ces obstacles ne sont pas levés, alors le calendrier évoqué lors de la dernière réunion qui s'est tenue le 16 janvier dernier, qui a prévu un démarrage de la réforme du financement en mars 2016, nous parait prématuré et hasardeux. J'ajoute que les données PMSI qui pour l'instant sont trimestrielles, voire bi-mensuelles, deviendraient mensuelles. "Les GME font partie de ces obstacles." H. : Mais pour le moment rien n'est tranché par le ministère de la Santé ? T. A. : Non, mais au dernier comité de pilotage, qui a eu lieu le 16 janvier dernier, on nous a promis des fiches reflets qui nous auraient permis d'avancer sur les obstacles. Et, ni du côté du ministère ni de la DGOS nous n'avons eu de retour. Troisième point : si l'année 2015 s'annonce comme décisive pour la réforme du financement du SSR, nous souhaitons au fil de l'eau, dès cette année, des simulations d'impact. Si l'on rentre dans l'inconnu cela peut être une catastrophe économique terrible pour le secteur SSR. H. : Vous craignez aussi la disparition des spécialités en SSR ? G. B. : Nous sommes actuellement dans le flou le plus total, que ce soit au niveau des GME, qui ne décrivent pas les lourdeurs, que ce soit au niveau de cette échelle tarifaire unique, dont on ne connait pas les modalités, que ce soit au niveau des simulations d'impact… Ils ont aussi évoqué la disparition des spécialités - cela été dit en comité de pilotage. La DGOS a nié mais nous avons pour notre part compris cela. Nous ne demandons qu'à être constructif et à travailler avec la DGOS mais aujourd'hui tout est prématuré, tout va trop vite… La seule chose qui semble arrêter c'est la date de départ de la réforme… Il est impossible pour des gens raisonnables de faire démarrer un nouveau mode de financement, sérieux et pérenne, dans un an. Et puis, enfin, il faut une harmonisation intersectorielle, nous soignons les mêmes pathologies, nous accueillons les mêmes patients, nous avons les mêmes établissements, les mêmes missions et les mêmes décrets. Ne faisons pas l'erreur qu'a rencontré le MCO, en 2006, date du début de la T2A, qui a été confronté au problème de la convergence tarifaire, partons sur de bonnes bases. "Il faut une harmonisation intersectorielle." H. : Pour la FHP-SSR, quelle serait la réforme idéale de la tarification ? G. B. : Nous ne nous opposons pas à une réforme de la tarification mais à condition que celle-ci soit construite de façon sérieuse, dans des conditions qui lui permettent d'être pérenne. Il faut des GME solides, des spécialités pérennisées, les établissements polyvalents et spécialisés doivent être pérennisés. T. A. : Nous craignons par ailleurs une campagne tarifaire 2015 difficile. En effet, l'on nous applique une triple peine. On nous reproche des dépassements d'activité dus en grande partie à l'effet champ, c'est-à-dire à des créations d'établissement qui ont été autorisées par les ARS lorsque des besoins ont émergé au titre des Sros. En tant qu'acteur responsable nous nous sommes positionnés et avons répondu aux appels d'offre. Et maintenant, quelques années après, on nous reproche cette dynamique d'activités. Deuxième peine que l'on nous impose : dès lors que nous faisons trop d'activité nous sommes sanctionnés. Dans le PLFSS 2015 a en effet été mis en place un système de réserve prudentielle. Enfin, le crédit impôt compétitivité emploi (CICE) nous est repris en baissant nos tarifs. Nous allons donc demander dans la prochaine campagne tarifaire des financements alternatifs et nous allons proposer des solutions, notamment via la création d'un forfait médico-technique qui nous permettrait de financer des actions de coordination dans les futurs parcours de soins. "Nous craignons par ailleurs une campagne tarifaire 2015 difficile." H. : Les négociations sur la campagne tarifaire 2015 ont-elles déjà commencé ? T. A. : Ces négociations auraient dû débuter à la fin de l'année dernière mais nous avons pris beaucoup de retard avec le mouvement de grève lancé par les cliniques et les événements dramatiques de ce début d'année (l'attentat contre Charlie Hebdo le 7 janvier dernier, NDLR). Normalement, la campagne tarifaire 2015 doit être bouclée en mars et, à fin janvier, nous n'avons toujours pas avancé."