Dans le jargon des maisons de retraite privées, on les appelle des « boosters ». Comprenez, en bon français : des entreprises qui vous aident à augmenter rapidement votre nombre de résidents pour obtenir un « bon taux d’occupation ». Alors que la crise du Covid et le scandale Orpea ont ébranlé le secteur des Ehpad, ces petites entreprises sont devenues très actives. Leur méthode : contacter les familles et les orienter systématiquement vers des Ehpad privées lucratives.
Là où le problème est qu’ils se présentent à ces personnes, souvent à la recherche de solutions d’urgence, comme des organisations « indépendantes et libres ». En réalité, selon les documents que nous avons pu consulter, ils sont payés par les Ehpad privés entre 2 000 et 3 000 euros par « résident placé ».
“J’ai été contactée très souvent, voire harcelée”, soupire Sylviane (les prénoms des témoins ont été modifiés), une sexagénaire qui cherchait, « démunie », dit-elle, une chambre en Île-de-France pour sa mère de 83 ans qui avait des problèmes de santé. « J’ai fait confiance, et on m’a proposé plusieurs établissements, tous privés, dont Orpea et Emera, et ils m’ont aussi proposé un tarif spécial sur la chambre, moins cher que d’habitude », rapporte-t-elle.
« Au départ, j’étais très contente de les avoir car ils étaient très réactifs et je n’avais pas besoin de les payer », raconte Anne-Marie. Un soir, j’ai fait des demandes sur Internet pour trouver une chambre pour ma mère, qui souffrait d’un début d’Alzheimer. Elle risquait sa vie si elle restait à la maison, car elle ne mangeait plus. Le lendemain, j’ai reçu plusieurs appels téléphoniques. Cap Retraits m’a trouvé très vite une solution : l’établissement, situé dans les Hauts-de-Seine, coûtait très cher mais en 48 heures, c’était réglé”, se souvient-elle.
---Une pratique trompeuse ?
Anne-Marie et Sylviane se sont alors rendu compte que les Ehpad en question avaient versé à ces intermédiaires, soi-disant indépendants, des sommes d’argent de l’ordre de 2 500 à 3 000 euros. « Au téléphone, je n’ai pas été dupe et je me suis dit qu’ils devaient se payer d’une manière ou d’une autre. Mais, à l’époque, j’ai dû réagir vite et dans la ville de province où j’habite, je n’ai pas pu régler le problème», regrette Anne-Marie, alors que d’autres solutions existent pour les soignants en détresse. Depuis 2015, le Fonds national de solidarité et d’autonomie (CNSA) propose un site internet à destination des soignants où sont répertoriées toutes les maisons de repos privées, associatives ou publiques, avec des informations vérifiées et gratuites.